C’est parti, le Road trip des tiers lieux entre dans sa deuxième phase ! Pour rappel, nous avions rencontré près de 15 porteurs de projets de la région Rhones-Alpes pour appréhender le concept de tiers lieux à l’automne 2020 (lire les articles de la catégorie road trip). Désormais, nous concentrons nos efforts sur le département de la Loire (42), le territoire cible du projet. Partons à la rencontre des élus, des projets associatifs et économiques du département pour présenter le concept d’auberge participative : et on commence par Noirétable !
Arrivée au village de Noirétable
Nous arrivons à Noirétable en longeant la défunte ligne de chemin de fer qui reliait Saint-Etienne à Clermont-Ferrand. Les paysages sont magnifiques, encerclés par des forêts à perte de vue dans le Parc naturel régional du Livradois-Forez, à la frontière du Puy de Dôme. Nous y resterons quelques jours pour rencontrer M. Denis Tamain, le maire de la commune.
Nous nous garons sur le parking du plan d’eau, où quelques courageux pêcheurs bravent les intempéries pour pratiquer la pêche à la mouche. En réalisant quelques recherches internet, nous tombons sur une série de podcasts invitant à la découverte du pays Nétrablais. L’interview d’un agriculteur retient notre attention, car il raconte avec passion son travail des petits fruits rouges.
Grâce à la magie des réseaux sociaux, nous sommes invités dans l’après-midi à venir visiter l’exploitation agricole ! La Ferme Du Phaux se situe sur les hauteurs du village, à l’orée de la forêt. En entrant dans le hameau d’une vingtaine d’âmes, nous apercevons les restes d’un écriteau “Café” sur un en-tête de maison. En effet, de nombreux travailleurs des scieries environnantes aimaient s’y retrouver à l’époque. Plus loin, la vue de la boutique confirme notre arrivée.
Visite de la Ferme du Phaux
Marine et Nathanaël nous reçoivent chez eux avec leurs 4 enfants, et leurs 4 chiens de traîneau ! Ils se sont installés ici en 2015 pour reprendre les activités de la ferme. Lui est issu du milieu agricole, et elle de la restauration. Ensemble, ils ont monté ce beau projet d’agroécologie qui donne naissance à des fruits d’exception. Mûres, myrtilles, fraises… Proposés en produits frais ou transformés en confitures, sirops ou sorbets. Il y en a pour tous les goûts !
Nous entamons la visite des cultures, accompagnés de deux canidés impatients de partir en balade.
La pleine saison arrive, les premières fraises rougissent, bien que la météo ne soit pas encore très clémente. La fraise à besoin de soleil, mais n’aime pas les grandes chaleurs, ce qui n’est pas un problème ici avec le climat montagnard. Nathanaël nous explique comment il arrive à produire des fraises bio en plein sol sans aucun traitement. Le secret réside dans la symbiose des plantes avec les micro-organismes des sols, dont les mycorhizes. Ces champignons parviennent à fournir des nutriments normalement inaccessibles aux plantes grâce à leur réseau de filaments mycéliens qui entourent les racines. En contrepartie, ils obtiennent les bénéfices de la photosynthèse des fraisiers. C’est un processus gagnant-gagnant.
“Entre choisir de se nourrir gratos (par des engrais) ou de payer (aux champignons), la fraise choisira le gratos!”
Par contre cela n’est pas bénéfique pour les sols, et favorise l’apparition de champignons néfastes pour la plante.
Après la dégustation, nous retournons à la ferme et discutons un peu du territoire. Nous apprenons notamment l’existence d’un projet, similaire en tout point à un tiers lieu. Nous espérons rencontrer ce collectif prochainement !
Rencontre avec le maire de Noirétable
Le lendemain, nous garons Jeannot dans le centre bourg et rejoignons à pied le parvis de l’église. Face à elle, la mairie, joli bâtiment en pierre qui possède à son sommet une petite cloche. M. Denis Tamain, le maire de la commune, nous rejoint à l’étage.
Agriculteur de profession dans l’élevage d’ovins, il accède au poste de maire en 1995. Nous évoquons le projet d’auberge participative et l’organisation d’un événement sur sa commune. Le concept de tiers lieu lui est plutôt familier. En effet, un collectif a organisé en 2019 un festival pour récolter les rêves et les envies de projets des habitants de 10 villages. Fort de cette expérience, le collectif s’est mû en association Les Monts qui Pétillent pour imaginer et construire l’avenir du territoire, “avec la conscience des besoins de la nature et de la vie des êtres humains”. Le maire leur apporte son soutien, en permettant aux membres de se réunir dans les locaux de la mairie.
“Nous avons besoin de personnes avec des idées”.
Nous lui demandons si l’étiquette “néo-ruraux” ne colle pas trop à la peau des nouveaux arrivants. Il nous répond que non : Noirétable a toujours accueilli des urbains, notamment parce qu’elle compte des infrastructures touristiques. Pourtant, il nous met en garde sur le point suivant : il ne faut pas s’enfermer entre “bobos”, mais plutôt apprendre à connaître son territoire et partager la vie de ses habitants. S’ensuit un échange sur le numérique et la place des élus auprès des administrés. Selon lui, l’outil numérique ne doit pas se substituer aux liens humains. Quand les jeunes élus proposent la mise en place d’un groupe Whatsapp, M. le Maire préfère démarrer sa journée au café du village. Il parle politique avec les habitants depuis 26 ans, et regrette que la jeune génération ne s’y confronte plus et a perdu le sens du collectif.
“si vous voulez connaître mon parcours, j’ai participé à la création de la confédération paysanne dans l’Aubrac ».
Nous découvrons un homme engagé pour sa commune, qui n’a jamais cessé d’apporter des solutions pour redynamiser ce territoire montagnard.
Un territoire qui lutte contre l’isolement
Malheureusement, Noirétable vit depuis quelques années une période difficile, touchée par la déshérence des services publics et la perte de son autonomie administrative en fusionnant avec une grosse intercommunalité. Mais ce qui est sûr, c’est que le territoire ne veut pas perdre la bataille du train engagée avec la SNCF. Elle se mobilise au travers du collectif Le Train 634269 de défense de la liaison ferroviaire entre Clermont-Ferrand et Saint Etienne.
Finalement est-ce que “Faire tiers-lieux”, ce n’est pas aussi tous s’engager, élus, collectifs d’habitants, associations, entreprises locales… pour peser dans la balance des décisions politiques qui affectent la vie d’un territoire ?
Après une bonne raclette à la Fourme de Montbrison, nous découvrons le casino du village avant de reprendre la route en direction du sanctuaire de Notre-Dame de l’ Hermitage avec son magnifique panorama, et enfin la station de ski de Chalmazel et son château.
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